La Nouvelle-Zélande est souvent associée aux All Blacks et à l’élevage de moutons. Personnellement, j’associe depuis quelques années ce pays magnifique à Meth Drinker. Certes un peu plus sale mais tout aussi monstrueux que les All Blacks. Désormais, un second nom vient se greffer à mon schéma et il est beaucoup plus proche de ce que propose un Cult Of Luna pour ne citer qu’eux. En clair, vous l’aurez compris, ça va démonter sévère avec Spook The Horses.
Spook The Horses est un sextet (ça devient assez rare, il faut le souligner) originaire de Wellington proposant un post metal très sludge ou l’inverse selon les humeurs de ses membres. Empty Body en question est par exemple très sludge et très violent, alors que People Used To Live Here est beaucoup plus posé, plus post rock aux accents drone. Pelagic Records ne s’est pas trompé en les signant, ils répondent à tous les critères requis par l’écurie allemande. Cette ambiguïté sur ce que le groupe propose d’une release à l’autre me parle. Ils sont insaisissables, inattendus et cela confère une puissance à chaque composition unique, propre à elle. Plus tard, après cette chronique, je me pencherai sur les deux autres efforts du groupe.
Empty Body, ce corps vide débute déjà à son visuel. Il me rappelle un peu l’esthétique de Code Orange, on y devine un corps se déplaçant à une vitesse infernale, si rapide que la pupille ne le capte qu’à peine. Le délire vient de débuter. Le jeu a commencé, le puzzle va se mettre en place et ne laisser personne indifférent. Car c’est bien la violence qui va rythmer les 39 prochaines minutes.
“Self Destroyer” s’ouvre sur un sludge martial, avec une voix qui n’est pas sans rappeler celle de Johannes Persson, très core, très agressive mais audible. L’atmosphère est lourde, comme si Nine Inch Nails avait bouffé du sludge au p’tit dèj. Sans qu’on y comprenne quelque, on a switché sur “Cell Death”, le clip en extrait. Le post metal à la sauce Cult Of Luna version éponyme nous embarque dans nos cellules grises. On est secoué mais on s’y sent bien, comme si une veine avait explosé pour libérer le venin. La composition va droit au but et nous ramène à l’évidence: Spook The Horses ne fera pas dans la dentelle cette fois.
Preuve en est sur “Counting Days on Bones”. L’aliénation ou la mort, l’un des deux nous guette avec ce riff répété jusqu’à ce qu’il ne sorte plus du crâne. Il est clairement question d’organisme sur cette galette, quelque chose d’enfoui dans un corps humain que l’on déterre pour le répandre dans tous les organes. Il est probable qu’en live avec les jeux de lumière, le cerveau va se dérégler. Je me sens de plus en plus dans mon élément en progressant dans ce disque, je viens de dépasser mes poumons, mon propre venin se focalise sur l’anéantissement de mon être et me transforme. Mais pour anéantir le corps, il faut détruire l’âme. Il en est question sur “Apology Rot” où l’esprit, l’aenima hurle ce qu’il peut pour survivre. Cela ne sera peut-être pas assez, le venin se propage trop vite comme ce corps sur le visuel. Le final de ce morceau est claquant.
L’âme n’est plus que chaire sur “Writhing”, le ton s’est durci, le corps vit ses derniers soubresauts. On ne sait juste pas quand le cœur lâchera. L’estomac est atteint, une bouillie le remplit. C’est violent, c’est malsain, c’est lourd. Après une courte interlude “Gestalt” qui s’apparente plus à un jugement rendu prévenant que la chaire se rassit, se pourrit seul, “The Maw” annonce le glas à venir. La basse se veut de plus en plus présente à l’oreille, comme une cisaille prête à effectuer le dernier coup fatal et qui s’impatiente. Les poumons commencent doucement à manquer d’air aussi, le venin a eu plus de difficultés à en venir à bout mais je vous le disais, rien ne va lui résister.
Avant de mourir, il n’est pas rare que le corps connaisse une accalmie. Un moment de paix où l’on pense que cela va mieux. “Watermark” va lui offrir un peu de répit. Mais non seulement, le propos reste sombre, mais le venin est bien là, aux abois. Il nous promet un final digne de ce nom et sera ce “Inheritance” avec cette basse qui enfin peut s’abattre sur les dernières chaires vives de cette carcasse emplie de venin noir et envahissant, agglomérant. Les quelques dernières secondes seront les dernières notes d’une vie qui s’éteint. Une vie qui n’est plus désormais avec l’encéphalogramme plat.
Avec son sludge très sale mais contrôlé et maitrisé, Spook The Horses transforme son quatrième opus en une blessure infectée qui gangrène la santé d’esprit de l’auditeur. Il est vraiment ce venin qui a donné un sens, un rythme à mon texte. J’ai d’ailleurs pris un plaisir malsain à m’imaginer ma propre pourriture, mon propre cancer qui me rongerait. Il est souvent compliqué pour les groupes de cette partie de s’exporter sur scène en Europe. Avec ce monstre vénéneux, le corps vide de Spook The Horses pourrait bien se propager partout rapidement. Le genre de contamination que je pourrais contracter volontiers…
Bonne écoute
- Tiph