Je m’apprête à faire plus de deux heures de route en voiture… Je choisis donc méticuleusement la musique qui va m’accompagner durant ce périple afin de le colorer quelque peu. Après un moment de recherche, je me souviens de cet album que j’avais reçu en promo depuis pas mal de temps, mais que je n’avais toujours pas pris la peine d’écouter. Ça tombe bien, il est déjà sorti et je peux donc me le passer en qualité optimale… Meilleure nouvelle : l’album dure quasiment deux heures, tout pile la durée de mon trajet. Et pour couronner le tout, le label Pelagic Records vous propose même l’album en intégralité sur sa chaîne YouTube :
Remarquez, le pari fou de faire un album aussi long peu se révéler destructeur s’il n’est pas bien exécuté. Deux heures, c’est long et la plupart des gens décrochent après une heure de musique. Pas moi, pas pour une galette de cet acabit qui est absolument somptueuse. Je n’ai donc pas manqué une seule seconde de ce disque qui a rendu mon voyage en voiture épique.
Le groupe suisse Abraham est donc de retour pour un troisième album dense comme jamais, un double qui plus est! Look, Here Comes the Dark raconte la fin des temps. Quoi d’autre pour un disque aussi extraordinairement sombre? Cet album-concept est divisé en quatre parties réparties sur quatre vinyles, de quoi ravir les fans de beaux objets, surtout que l’édition colorée est particulièrement réussie, comme toujours chez Pelagic.
Ces quatre parties, Anthropocene, Phytocene, Mycocene et Oryktocene, racontent la fin de la civilisation humaine telle que nous la connaissons aujourd’hui. Anthropocene dépeint un spectacle sinistre où les rares survivants humains tentent d’échapper au chaos urbain qui s’installe peu à peu, cette ambiance post-apocalyptique est représentée en musique par des paysages sonores lugubres se rapprochant du doom métal ou du sludge avec même quelques passages très rythmés au chant criard qui évoque la panique d’une telle situation.
Dans la seconde partie, Phytocene, la nature reprend ses droits sur la vie humaine et envahit les villes. Cette atmosphère suffocante se retrouve à la perfection dans la musique où l’accent est mis tout particulièrement sur les basses et les ambiances pesantes. Afin d’amplifier cette sensation d’air irrespirable, les rythmiques sont ralenties et elles renforcent ainsi le sentiment de lourdeur. « Dead Cities » est un titre à ne pas manquer durant cette partie!
Mycocene brosse des paysages envahis par du mycélium végétatif qui contrôle toute forme de vie qui subsiste encore sur Terre. La dernière sorte de conscience qu’il reste sur cette planète consiste en une entité gigantesque qui n’a qu’un seul objectif : débarrasser la planète de l’humanité pour de bon. Le groupe embarque dans une troisième partie plus expérimentale où le métal rencontre le psychédélisme, le prog et le jazz. Mycocene est sans aucun doute ma partie favorite sur ce disque! Les morceaux « Sanctuaire » et « Vulvaire » valent vraiment le détour.
Enfin, Oryktocene est un final grandiose digne des trois premières parties du disque. Comme le dernier morceau, « Space Departure », le suggère, la Terre n’est plus qu’un vulgaire rocher qui flotte dans l’espace et les quelques survivants parviennent donc à s’échapper de cet enfer. Vous pouvez donc l’imaginer, les compositions sont minimalistes, froides, brutes et cyniques. La musique drone est majoritaire dans cette partie ou tout espoir a disparu.
Look, Here Comes the Dark est un album somptueux de A à Z et malgré la diversité des styles représentés, le groupe fait preuve d’une incroyable cohérence. Il affirme son identité musicale, quelle que soit la partie écoutée. Que vous soyez fans de Cult of Luna, ISIS, ou encore d’Amenra, cet album est pour vous. À partir de là, comment imaginer qu’il ne soit pas haut classé dans le top des meilleurs albums de 2018? On se retrouve en fin d’année pour en parler!
- Guillaume