Le premier EP de Boucle Infinie, intitulé 直線移動, est passé sous le radar de NMH à sa sortie, le 24 novembre dernier. Heureusement cette erreur a été corrigée, et l’EP, ainsi que l’artiste derrière la musique, capte maintenant totalement notre attention.
Boucle Infinie est en fait un side-project solo de Rémi Gallego, originaire de Perpignan et résidant à Berlin. Il est également le fondateur du groupe de djent électronique The Algorithm, formé en 2009, qui a sorti trois albums à l’heure actuelle, le dernier en date livré en 2016. Si vous êtes déjà familiers avec le groupe, vous remarquerez une nette différence de ton entre ce dernier et ce nouveau projet.
Le pari est osé : mélanger synthwave, IDM, post-rock (et j’en passe) et obtenir un résultat homogène et pertinent. Force est de constater que le challenge n’a pas été trop grand pour Rémi : il nous livre cinq morceaux remarquablement travaillés durant lesquels les transitions entre genres, subtiles ou explosives, ne manquent jamais de sens.
L’évolution de chaque morceau est très organique, un (heureux) comble pour une musique à l’atmosphère rétrofuturiste si aisément associée aux univers dystopiques peuplés d’androïdes. Si ce n’est pas encore suffisant pour vous vendre le projet, sachez aussi que Judith Hoorens, de We Stood Like Kings, officie sur l’excellent closer.
Le ton est donné dès la première piste, d’emblée très cinématographique, qui peint un tableau mental en concordance totale avec la (magnifique) couverture de l’EP. En introduisant d’abord basse et synthés, l’effet de l’arrivée des guitares et percussions dans un style post-rock totalement assumé est surprenant.
Si au terme de cette introduction vous pensez avoir cerné le projet, détrompez-vous : chant typé new-wave, vrombissements industriels et autres solos de guitare vous attendent au tournant sur le morceau « Inside », étonnement entraînant sans pour autant contraster avec les thèmes et l’ambiance de l’EP.
Pour ce qui est des émotions évoquées, un sentiment de nostalgie est ici au premier plan, amené aussi bien par les synthés rétros si chers à la synthwave que par les crescendos et climaxes qui font l’apanage du post-rock. On ne tire pas forcément pour autant des morceaux de 直線移動 une quelconque tristesse ; au contraire les sonorités présentes vont plutôt dans le sens d’un certain optimisme, un cran en dessous peut-être de ce qu’on pourrait qualifier de vraiment joyeux. Le contraste entre ces émotions est savamment représenté sur la couverture également, où l’on peut voir la décadence de l’urbanisme partager la vedette avec la sérénité de la nature.
Pour un premier essai dans le genre*, Boucle Infinie signe une oeuvre diablement réussie. Il va sans dire que l’album faisant suite à cet EP est très attendu.
*peut-être pas si soudain, puisque The Algorithm laissait déjà présager cette direction, notamment sur le morceau « Userspace » de leur dernier album Brute Force, plus restreint par rapport au reste de l’album.
- Anthony